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[Histoire] Les bus au Gazogène de la CTL en 1940

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Message par Etienne56 Dim 20 Jan 2019, 18:15

Une interview de M. Loury, directeur de la CTL, parue le 9 août 1940 dans l'Eveil du Morbihan, nous permet de tout savoir sur le Gazogène et ses avantage en période de pénurie d'essence, comme c'était le cas pendant l'occupation.

Voici la retranscription intégrale de l'article :

Nos interviews

Le Gazogène et les Cars Lorientais

Le "gaz des forêts" est aujourd'hui au premier plan de l'actualité, et comme nous possédons à Lorient une entreprise de transports dont un certain nombre de véhicules sont munis de gazogènes, j'ai pensé qu'il y avait là un sujet d'interview qui ne pourrait manquer d'intéresser nos lecteurs.

Me voici donc au siège de la Cie des Tramways qui, comme chacun le sait, n'a conservé de ce moyen de locomotion que le nom.

Le directeur, M. Loury, m'accueille dans son bureau et le plus aimablement du monde se déclare prêt à répondre à toutes mes questions.

- "Actuellement, me dit celui-ci, nous possédons quatre cars fonctionnant au charbon de bois. C'est par raison d'économie que nous avions, depuis quelques années, décidé de nous tourner de ce côté; le prix de l'essence ne nous permettant plus de boucler notre budget.

- De quel ordre de grandeur est l'économie réalisée ?

- "C'est bien simple. Pour un litre d'essence consommé, il faut compter 1 kg 700 de charbon de bois. Or un litre d'essence vaut, aujourd'hui, environ 5 francs, et 1 kg 700 de charbon de bois, à 1 fr. 40 le kilog., coûte en chiffre rond 2 fr. 50, soit une économie de moitié.

L'Exploitation Electrique, société qui régit notre entreprise a, sous l'impulsion de son directeur général, M. Perdreau, adopté le gazogène. C'est ainsi que les réseaux du Mans, de Rennes et d'Angers ne comptent plus que des cars marchant au charbon de bois.

- Et vous êtes satisfait de ce carburant.

- " Extrêmement satisfait. Notre premier car Renault muni d'un gazogène de la maison Gohin-Poulenc d'Orléans a fait près de 100.000 kilomètres, c'est dire qu'il a fait ses preuves. Les trois autres, équipés de gazogènes de la maison Cesbron, à Chemillé (M. et L.), assurent avec régularité leur service. Et, ajoute M. Loury, comme depuis un mois je prévoyais le manque d'essence, je les ai fait donner à plein. C'est ainsi qu'au mois de juillet sur un total de 11.270 kilomètres parcourus par 7 de nos cars, 10.410 ont été effectués exclusivement par des véhicules à gazogènes.

Notons que les deux derniers cars ont été transformés à Lorient par les soins de la Cie des Tramways et donc sous la direction de M. Loury dont l'éloge n'est plus à faire, tant au point de vue commercial qu'au point de vue technique.

- Mais le rendement du charbon de bois n'est il pas très inférieur, j'ai entendu parler d'une diminution de puissance de 40 % ?

- "Non ! me répond M. Loury, il ne faut pas exagérer à ce point, mettons au plus 20 % et l'on peut encore réduire cette déficience en enrichissant le gaz par une adjonction d'essence dans les côtes.

- Et maintenant nous posons la question qui se pose pour tout et en tout : Et comment est assuré votre ravitaillement en combustible ?

- "Jusqu'à ces derniers temps le charbon de bois nous était fourni par le Comptoir du Charbon de Bois épuré. Depuis l'occupation j'ai trouvé dans le pays un fournisseur : M. Péron de Bannalec qui emploie trois charbonniers travaillant en forêt (comme au bon vieux temps) et qui en outre, possède un concasseur indispensable pour réduire le charbon en petits morceaux d'environ 1 centimètre sur 2 centimètres et demi.

Il n'est rien de tel que de voir pour bien comprendre, aussi en vue de m'expliquer le fonctionnement du gazogène, M. Loury m'emmène dans son vaste garage. Au fond de celui-ci voici justement le doyen de nos cars à charbon de bois.

A l'arrière du dit véhicule se trouve un vaste entonnoir aplati, c'est le gazogène. Le foyer est constitué par le tuyau, qui termine tout entonnoir, tandis que celui-ci proprement dit contient la réserve de charbon qui peu à peu descend, à mesure que se consume le combustible du foyer. Vous voyez comme c'est simple.

En brûlant, le charbon de bois dégage un gaz pauvre qui, mélangé à l'air, forme un gaz détonnant. Aspiré par le moteur, le gaz passe à travers des filtres, constitués par des compartiments remplis de miettes de liège ou d'étoupe de laine, puis pénètre dans le moteur et boum ! l'étincelle électrique le fait exploser. Quelques milliers d'explosions comme celle-là et vous voilà à Hennebont.

Ainsi en quelques mots M. Loury m'a dévoilé tous les secrets du gazogène que j'espère vous avoir fait comprendre à mon tour. Maintenant j'entame la question pratique.


- Et le départ ne demande pas de trop longs préparatifs ?

- " Nullement. Le car possédant un réservoir de cinq litres d'essences, on fait partir le moteur sur celle-ci, puis on le fait aspirer sur le gazogène. A ce moment là, par un orifice prévu à cet effet, on introduit sous le foyer une taupette enflammée et en quelques minutes celui-ci est en activité. La mise en route ne demande pas plus de dix minutes.

- Et l'entretien ?

- "Tous les 300 kilomètres environ il faut vider et nettoyer le foyer, et tous les 5.000 kilomètres laver à grande eau les conduits qui mènent le gaz au moteur.

Evidemment, comme conclut M. Loury cela demande un peu plus de peine que l'essence, mais on a rien sans mal et 50% d'économie mérite bien quelques instants de travail.

D'ailleurs, aujourd'hui, il n'y a pas à choisir, le gazogène s'impose et il peut faire naître dans notre pays une grande industrie nationale, ou plus exactement une double industrie qui donnera à la fois du travail aux ouvriers de nos villes et à tous les artisans de la forêt française.

Comme je m'apprête à partir le dernier car transformé qui, tout en travaillant, termine sa mise au point, rentre au garage. Le contrôleur qui vient de le piloter en cette occasion déclare :

- "Il tire merveilleusement, nous avons monté toutes les côtes en prise directe.

sur ce, je prends congé de M. Loury en le remerciant de ses aimables explications et en le félicitant de sa belle réussite que va rendre de grands services à notre région.

Pierre MIRVILLE



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Message par Christobal Lun 21 Jan 2019, 20:04

Ça change des entrevues qu'on lit ces jours-ci dans la presse, où il est plutôt question de FCPE, de services scolaires inadaptés, de manque (ou d'absence) de concertation sur le nouveau réseau...

Merci Étienne pour ce partage ! Pouce

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Message par Etienne56 Lun 21 Jan 2019, 23:25

Et oui c'était un autre temps !

Ce que j'ai trouvé intéressant c'est de savoir comment ça fonctionnait Smile j'avais pensé au gaz et pas au charbon de Bannalec Laughing
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