VivaBREIZH ©
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment : -20%
Ecran PC GIGABYTE 28″ LED M28U 4K ( IPS, 1 ms, ...
Voir le deal
399 €

[Histoire] Un projet, sans suite, de tramway hippomobile à Lorient en 1888

Aller en bas

[Histoire] Un projet, sans suite, de tramway hippomobile à Lorient en 1888 Empty [Histoire] Un projet, sans suite, de tramway hippomobile à Lorient en 1888

Message par Etienne56 Ven 15 Fév 2019, 21:41

Le 15 novembre 1888, les lecteurs du Nouvelliste du Morbihan, apprennent qu’ On parle en ce moment, qu'une société est en voie de formation pour l'exploitation de tramways à traction de chevaux.

La première ligne au départ du Pont-Tournant desservirait les rues du Commerce, du Port, Poissonnière, Pont-Carré, place Bisson, rue du Morbihan, cours Chazelles et rue de Brest jusqu'à Calvin.

Cette nouvelle est à l’origine d’une Chronique Lorientaise, signée Yan Carnel, en faveur du tramway et de ses avantages, sur un mode humoristique, publiée une semaine plus tard dans l’édition du 22 novembre :

En voiture :

Ma foi, tant pis pour l'honorable corporation des cordonniers, mais tant mieux pour les gens pressés qui du matin au soir brassent les affaires. Le temps est chose aussi précieuse que l'argent puisqu'il permet d'acquérir et de faire valoir cet or si convoité.

La chose est décidée, paraît-il, et pour peu que l'opinion et la bourse publiques poussent ensemble à la roue, nous voyagerons bientôt en tramways depuis les Quais jusqu'aux limites extrêmes des faubourgs !

V'là l'tramway qui passe
Tout le long de la rue du Port,
Amis, prenez place
Car il pleut… il pleut bien fort.

Enumérons les nombreux avantages de ce moyen de locomotion encore si peu en usage dans la province. Au lieu de trottiner du soir au matin dans la fange grasse des pavés humides, au grand détriment de nos semelles et de consacrer des efforts inouïs à maintenir ouvert un parapluie qui ne demande qu'à faire de la galette à chaque rafale, nous nous étendrons confortablement sans pardessus et sans riflard sur les banquettes rembourrées de larges véhicules tirés à quatre chevaux.

Le plus humble des prolétaires pourra se payer le luxe d'une promenade en voiture pour la bagatelle de quelques centimes et rêver un instant qu'il roule dans un sien carrosse. Quel doux songe !

Quant aux rhumes, aux pituites, aux catarrhes bronchitiques dons perfides et forcés de la saison des pluies et des frimas, ils iront rejoindre leurs aînés envolés. Par suite, nous jouerons moins souvent de la trompette nasale et nos mouchoirs de poche seront un peu plus secs.

En été, ce sera plus charmant encore. Nous éviterons les coups de soleil qui donnent au visage la couleur des écrevisses cuites et les transpirations désagréables auxquelles sont sujettes les personnes atteintes d'un embonpoint excessif. Le dimanche nous nous rendrons, en villégiature presque instantanément, au bord du rivage ou en pleine campagne sans mettre le pied dans la poussière des routes.

Bien plus, je vous laisse à penser comme il sera agréable aux bavards de faire le chemin qui sépare l'atelier de la maison, en compagnie d'aimables voisins et de gentilles voisines qui ne dédaigneront pas de faire la causette ou de rire un brin.

Les grincheux, les poètes et les philosophes, amants de la solitude, monteront sur l'impériale, afin de rêver les yeux au ciel.

Le matin, dès huit heures, la gent toujours pressée des fonctionnaires civils et militaires prendra d'assaut les tramways en partance. C'est alors que l'on commentera les nouvelles politiques.
A neuf heures, nous aurons le tramway des bonnes et des ménagères allant au marché, le panier au bras.
A midi, le tramway des ouvrières et des commis de magasin. Que d'éclats de rire, de causeries tendres, d'intrigues ébauchées !
Enfin le soir, à quatre heures, l'essaim bruyant des écoliers montera en voiture pour gagner plus rapidement le toit paternel. Les coups de poing, les batailles, les chansons iront leur train et la jeunesse s'en donnera à cœur joie.

A quand les tramways Lorientais, invention vraiment utile et à la fois agréable ?

Enfin notre ville va donc entrer fièrement dans la voie du progrès. Puisse-t-elle n'en jamais sortir, et puissent les tramways ne jamais dérailler !

Espérons que les lignes principales seront prolongées, extra-muros, jusqu'aux confins de Merville, de Carnel et de Kerentrech, car c'est surtout aux personnes qui habitent hors de ville que le nouveau service de voitures rendra le plus de services.

La société qui essaye de se fonder fera bien d'accorder, dès le début, certains privilèges, tels que cartes d'abonnement, billets de famille, réduction de tarifs, etc... aux habitants des faubourgs qui contribueront certainement pour une grande part au succès de l'entreprise.

Qu'on mette donc enfin tout en œuvre pour rendre plus commodes et plus rapides les communications entre les divers quartiers de Lorient et relier plus étroitement au centre de la commune les quartiers populeux séparés jusqu'ici par des murailles inutiles et gênantes.

Viennent donc les tramways qui battront en brèche ces remparts inébranlables et permettront à la ville de s'étendre et de se développer comme une cité qui croit et espère en l'avenir.

Nous applaudirons toujours aux tentatives que feront nos concitoyens pour augmenter le bien être des Lorientais et attirer chez nous le plus grand nombre possible d'étrangers.

Yan CARNEL

Enfin, dans son édition du 20 décembre, le Nouvelliste, publie la copie du courrier adressé aux membres du Conseil Municipal de Lorient, par M. Drouard, au nom de la Société en formation pour l'exploitation d'une ligne de tramways à Lorient :

Messieurs,

Au nom de la Société qui se fonde pour l'exploitation d'un tramway dans notre ville, j'ai l'honneur de vous demander la concession de ce tramway, mode de transport économique et commode que, pour ces motifs, la population de votre ville verra établir avec plaisir.

Le système que nous employons est avec traction de chevaux; la voie ferrée aura 0m70 de largeur entre les rails.

Nous proposons de relier le port avec la gare et Calvin au haut de Kerentrech, en passant par le quai (du Pont-Tournant à la rue Poissonnière) les rues Poissonnière et Pont-Carré, les places Bisson et de l'Eglise, la rue du Morbihan, le cours Chazelles, la rue de Kerentrech jusqu'à la croix de Calvin.

Nous vous demandons, pour l'établissement de nos gares qui auront 5m. de longueur sur 3 m. 50 de largeur, un emplacement sur le quai, côté ouest du Pont-Tournant, une autre place Bisson, une troisième à la porte du Morbihan, une quatrième sur la place près la rue de la gare; enfin une dernière à l'extrémité de notre ligne, au haut de Kerentrech.

Nous aurons deux voitures partant en même temps des deux points extrêmes qui se rencontreront sur le cours Chazelles où nous établirons le croisement.

Nous nous proposons d'établir les prix de transport des voyageurs comme suit :
Cinq centimes pour un parcours entre deux stations
Dix centimes entre trois stations
Quinze centimes entre quatre stations.
vingt centimes pour le parcours entier.
Les employés et ouvriers des arsenaux seront transportés avec une réduction de 60% moyennant des abonnements mensuels.

Le parcours entier sera effectué en 12 minutes, le premier départ de Calvin sera réglé le matin, de telle sorte que nous rendrons les employés à l'Arsenal à l'heure réglementaire d'entrée.

Les voies parcourues par notre ligne seront entretenues à nos frais sur toute la surface occupée par notre tramway.

tout notre personnel et notre matériel seront à la disposition de la ville en cas d'incendie ou d'autres sinistres, comme dans le cas d'un pressant besoin de transport de troupes.

En prenant une décision prochaine, nous nous engageons à avoir notre ligne prête à marcher pour le printemps prochain.

Les marchandises qu'on nous offrira à transporter le seront avec un rabais de 25 à 35% suivant la nature de ces marchandises, rabais calculés sur les prix ordinaires des transports.

Veuillez agréer, Messieurs, etc.

R. DROUARD

Le projet restera sans suite, pour des raisons que j’ignore encore (mais il est vrai que la lettre ne mentionne pas le financement envisagé pour les travaux de construction du réseau, et de son exploitation, et la promesse d’une mise en service “au printemps prochain” semble irréaliste et farfelue !) et il faudra donc attendre 1901 pour pouvoir enfin prendre le tramway à Lorient !
Etienne56
Etienne56

Masculin Messages : 620
Age : 48
Localisation : Lorient et Brech
Date d'inscription : 15/09/2013

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum